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ANDRÉ SUARÉS

CHANT DES GALLOISES

I

Voici que le soir tombe, avec l'orage. Et le soleil passionné descend, comme un blessé se traîne avec lenteur sur la colline: il descend sur la mer, avec un sourire, tout en sang. Et tout à l'heure, le divin Héros sera couché sur le lit qu'il préfère.

Voici que le soir tombe. Les jeunes filles de l'Ouest viennent sur la prairie; et viennent aussi les jeunes femmes de la douce terre. Elles sont deux chœurs qui se rencontrent dans l'herbe fleurie et l'odeur du blé noir, qui sont le miel et la vanille.

Elles s'avancent les unes vers les autres, les vierges et celles qui le furent, les nids à baisers et celles qui voudraient l'avoir été. Elles désireraient de danser: mais ni les amants, ni les fiancés ne sont plus là. Est-ce qu'ils sont tous morts? Ils sont tous partis pour l'œuvre dure et pour la guerre. Elles ne pourront plus fouler le raisin de la joie dans la danse. Et elles ne veulent pas danser aux bras l'une de l'autre. Il ne leur reste qu'à lancer leur âme dans le chant.

Chantez, les belles! L'heure du chant sonne pour vous, sur la prairie brûlante, entre le mur des chênes et les lèvres de l'océan. Allez, mes belles! Mettez-vous, les libres jeunes filles, au bord de la vague verte. Et vous, les jeunes femmes, contre la haie des feuilles au cœur déchiqueté, qui vous sépare de l'Orient.


II

LA JEUNE FILLE

Amour! un an de guerre! et les treize mois sont révolus! O fiancées que nous sommes! Douloureuses, pleines de sourires, avides de danser et tant déçues, où êtes-vous, nos fiancés?

Notre voix est toute chaude. Notre voix vient du feu, pour vous ap-

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