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Que la haine des negres soit arrivee, aux Etats- Unis, a un paroxysme effrayant, cela ne saurait plus faire de doute pour personne. Beaucoup dhommes eminents, des Etats du Sud annoncent ouvertement qu'une crise decisive est proche ; ils prevoient un grand bouleversement aboutissant a une veritable guerre de races. Les blancs et les noirs sont exasperes ; on pro- fere de part et d'autre d'horribles menaces. Le presi- dent Roosevelt, lui-meme, a compromis un instant sa popularite, en cherchant a prendre la defense des Afro- Americains et en exhortant ses compatriotes a mon- trer plus de moderation. Maintenant, plus de pitie, plus de quartier ! Tout negre arrete a la suite d'un delit ou il a mis en peril la vie ou la propriete d'un blanc, est arrache de sa prison par une foule furieuse et tue quelquefois apres des tortures prolongees. Sou- vent des noirs sont attaches a un poteau, imbibes de petrole, et, changes en torches, brulent vivants devant des milliers de spectateurs qui exultent. Notez que les organisateurs de ces executions ne sont point des hors-la-loi, des vagabonds, des malfaiteurs. Tres sou- vent les directeurs de ces holocaustes sont les citoyens les plus notables de leur localite et il advient que la population de toute une region afflue en masse pour assister a ces sacrifices. Quelquefois, — cela est a peine croyable, mais c'est vrai — des trains speciaux sont organises qui convergent vers le lieu de I'execution. II y a peu de temps, un appareil telegraphique, installe provisoirement pour la circonstance, transmettait mmute par minute aux habitants dune ville, situee a plus de soixante kilometres, le recit detaille des con- vulsions, des contorsions dun negre devore tout vif par les flammes. Le plus grave, c'est que la coutume de lynchage s'etend, et partie du Sud, s'implante dans les Etats du Nord. En 1892, 241 lynchmgs furent perpetres aux Etats-Unis ; en 1893, les sociologues americains en ont compte davantage encore, et au cours de I'annee 1899 plus de 500 negres furent mis a mort par le peuple furieux. Si on dresse la statistique